Une petite envie de verdure ...

Une douce nuit en cette saison, les senteurs d'un parc urbain protégé et avant tout entretenu. Pouvoir en faire le tour de nuit était un privilège qui se méritait. Charles l'avait acquis en soudoyant un gardien, pour trois cent cinquante dollars, il avait pu obtenir un double de l'ensemble des clés ouvrant les portes d'accès. Cette nuit comme toujours, il avait laissé derrière lui une porte ouverte car il n'arrivait pas à comprendre la raison qui empêchait les gens d'interdire à tous la vue de la beauté nocturne du Griffith.

Marchant le long des allées, l'artiste laissait son imagination défiler et ne pouvait s'empêcher de repenser à ses premières années à L.A. Sa canne effleurait les graviers du sol de l'allée centrale tandis que sa main gauche tenait fermement un coffret en cuir aux bordures de chêne verni. S'extirpant de sa rêverie, il prit le temps de reconnaître son chemin jusque à une petite cascade aménagée. Ce petit coin de paradis était doté d'une très belle acoustique et il s'agissait bien là du but de la virée de Charles ce soir. Franchissant enfin les frondaisons, il se maudit de ne pas avoir suivi la route jusqu'à son terme et d'avoir coupé par les arbres. Ses chaussures vernies venait de prendre un léger petit revers de fortune. Plus serein qu'embarassé il s'assit sur le banc, son coffret posé à ses cotés avec sa canne. Il savoura dès lors un temps de repos, uniquement troublé par le bruit de la cascade et les frémissements des feuilles.

Alors qu'il fermait lentement les yeux, il laissa sa voix partir et se mit à chanter une ode en vieux français:

"Je contemplais un jour le dormant de ce fleuve

Qui traîne lentement les ondes dans la mer,
Sans que les Aquilons le fassent écumer
Ni bondir, ravageur, sur les bords qu'il abreuve.

Et contemplant le cours de ces maux que j'épreuve,
Ce fleuve, dis-je alors, ne sait que c'est d'aimer ;
Si quelque flamme eût pu ses glaces allumer,
Il trouverait l'amour ainsi que je le treuve.

S'il le sentait si bien, il aurait plus de flots,
L'Amour est de la peine et non point du repos,
Mais cette peine enfin est du repos suivie,

Si son esprit constant la défend du trépas ;
Mais qui meurt en la peine il ne mérite pas
Que le repos jamais lui redonne la vie."

La vampire était sortie ce soir là avec un petit air qu'on ne lui voyait pas souvent. Elle avait l'air plus calme, moi pressée que les autres nuits. Ceci s'expliquait par la fermeture exceptionnelle du bar Obscur. Enfin un peu de repos et une nuit à chasser ou s'amuser à son aise sans avoir à subir les appels de Jack qui s'impatientait sans arrêt. D'ailleurs ce soir elle l'avait envoyé rencontrer quelques femmes de sa connaissance. Elle espérait qu'il découvrirait les joies d'aimer sans s'attacher à quelqu'un en particulier.
Ses pas la conduisirent sans qu'elle l'ait vraiment prévu, à Griffith Parc. Sans doute le souvenir de sa première rencontre surnaturelle. Elle marchait sur l'herbe décorée des dernières "oeuvres" contemporaines. Mais quelque chose semblait différent ce soir là. Elle ne sentait pas la présence des gardiens du jardin. Et d'ailleurs une des portes était ouverte. Elle décida d'y entrer et se laissa guider par le bruit d'une petite cascade. Elle suivit le chemin et le son. Elle ne se rendit pas tout de suite compte de la présence d'une autre personne. Puis elle parvint enfin à l'endroit. Elle trouva quelqu'un assis là, sur un petit banc et chantant en vieux français. Elle comprenait ce qu'elles disaient et pour parler ainsi il fallait que l'homme soit bien vieux. La vampire bien sur ne mit pas longtemps à reconnaitre que la personne soit un vampire.
Il lui tournait le dos et semblait ne pas l'avoir vu puisqu'il ne s'était pas arrêté dans sa chanson. Elle avança encore de quelques pas et resta là à l'écoutait. Lorsqu'il finit sa chanson, elle se mit à applaudir lentement. Et lui parla dans la même langue que la chanson.

-Bravo! Belle prestation messire!

La présence de quelqu'un ne le dérangeait en rien, mais la surprise fut telle qu'il ne put s'empêcher de sursauter avant de se ratrapper délicatement et aussi adroitement que la convenance put lui permettre. Il se retourna et fit enfin face à une jeune femme ... Mais point jeune à mieux y regarder. Ce port de tête, ces traits si fins mais si ... rares tout cela attaché à une posture élégante assez arachaïque pour en devenir mystérieuse et séduistante en cette si drôle d'époque. Il avait en face de lui une autre prisonnière éternelle de sa condition. D'un coup de tibia adroit, il fit voltiger sa canne dans sa main avant de contourner le banc et de venir poser un délicat baisemain sur la main de sa rencontre du soir. Il se mit dès lors à lui parler en ancien français également, sans le moindre accent que ce soit et avec la plus parfaite des syntaxes :

"- Je vous remercie tout autant qu'un Cisyphe libéré de son tourment chère compagne d'éternité. Veuillez excuser ma surprise et ... Une seconde je vous prie ..."

Il sortit de la poche intérieure de son costume St-Laurent un mouchoir noir aux reflets violets pâles à la couleur de la lune. D'un geste expert, il nettoya rapidement ses chaussures pour apparaître sous un jour décent.

"- Ma déplorable présentation en ce soir si serein."

Après avoir repris tout son aplomb, il leva un index triomphant accompagné d'une expression de confusion.

"- Mais, pardon. J'en viens à me conduire comme en des temps déraisonnables, comme dirait un écrivain que j'ai bien connu."

Tout en présentant son bras à la jeune femme, il fit léviter son coffret pour le poser sur les graviers au bas du banc. Avec un sourire de courtoisie, il reprit d'une voix posée et emplie d'un respect non feint :

"- Prendrez vous un siège ? J'aurais bien une tasse de thé à vous proposer, si cette boisson avait pu réusir à nous contenter. Mais je dois avouer que le plus souvent mes chants n'amènent pas d'autres surnaturels, mais plutôt des mortels."

Il ne chasserait peut être pas ce soir, mais il resterait agréable pour Charles de parler avec un autre vampire que Peter, ce qu'il n'avait pas fait depuis près de deux ans.

Il avait un parlé de gentleman et on pouvait tout à fait deviner de quelle époque et de quel milieu il pouvait être issu. Ces manières n'étaient pas pour déplaire à la belle Tarjha, mais elle aurait du mal à converser avec des manières aussi délicates. Elle accepta le baise main avec un sourire qui découvrait ses crocs blanc.
La jeune femme prit volontier le bras du vampire.

-Je prendrais place avec grand plaisir.

Elle se fit accompagner jusqu'au siège et y prit place, arrangeant sa robe afin qu'elle ne se salisse pas.

-Je vous remercie pour le thé mais ce n'est point ma boisson favorite.

Avec son étonnement elle avait oublié de se présenter. Elle se releva et fit une petite révérence.

-Je ne voudrais pas paraitre grossière en ne me présentant pas! Je suis Tarjha Dröfursdotir.

Charles accompagna donc la vampire au banc où il la laissa s'installer et s'inclina en une subtile révérence quand elle se présenta. Avec un mouvement précis et net, il dégaina son épée, habilement cachée dans sa canne et la présenta à la verticale devant son visage, fit un élégant mouvement circulaire dans l'air avant de la rengainer et dit enfin :

"- Charles Célestin Joseph, Vicomte D'Audemard. Mais il va de soi que pour vous, ce sera Charles. Je suis enchanté de faire votre connaissance Lady Dröfursdotir, et pardonnez moi d'avance de m'accaparer quelques instants de motre vie nocturne, il y a si longtemps que je n'ai pas croisé un de mes semblables."

Invitant la vampire à s'asseoir, il en fit de même, présentant un visage souriant et poli à son interlocutrice. Il reposa la canne à son coté et reprit la conversation avec un plaisir non feint :

"- Votre arrivée à Los angeles est-elle récente où n'ais-je tout simplement pas eu la chance de fréquenter les mêmes personnes que vous durant les dernières décades ?"

Il avait les manières d'un gentleman et d'un mousquetaire. Son nom était très long et bien sur complexe à retenir. Mais heureusement il lui permit de le nommer par son prénom. Elle s'inclina devant sa présentation digne d'un des plus grand roman de cape et d'épée puis repris place à ses côtés.

-Je suis enchantée de vous rencontrer Charles! Et rassurez vous, je pourrais vous consacrer la nuit entière s'il le faut!

Ce n'était pas le premier vampire qu'elle rencontrait et celui-ci était plus jeune qu'elle mais il dégageait quelque chose de particulier. En tout cas ce n'était pas une mauvaise idée que de discuter avec un vampire de cette classe!

-Disons que je connais Los Angeles depuis sa création et j'ai suivie son évolution par fragments. Mais je ne fréquente que très rarement ces lieux ou la haute société dont vous semblez être issus.

Tout en parlant elle l'observait du coin de l'oeil et de façon discrète. Elle s'arrêta quelques instants sur son petit coffret et sa cane épée puis revint à son visage. Il semblait qu'il ne lui était pas inconnu mais elle doutait de l'avoir déjà croisée.

" - La haute société n'a plus grand chose à voir avec moi vous savez ... Is ne m'appellent que quand ils ont besoin d'un peu d'ambiance sonore."

Elle n'avait certes pas les manières ni la tenue vestimentaire d'une personne vivant à Beverly Hills ou bien encore sur les collines de la ville. Cependant elle ne ferait pas mauvaise figure dans ces strates là, dont les manières étaient tout de même de plus en plus proches des gens simples. Ce n'était pas pour déplaire à Charles, mais le rôle qu'il jouait dans la vie tenait uniquement à cette préciosité.

"- En général, je reste dans ma villa, à prendre soin d'antiquités et d'instruments de musique en attendant la perspective de pouvoir me produire sur scène. Comprenez donc ma joie de parler à l'un de mes semblables."

-Oui je vous comprend. Et c'est également un plaisir que de pouvoir m'entretenir avec un immortel de mon espèce.

Il venait de lui donner un précieux indice sur lui même. Ou plutôt une indication sur les occupations qu'il tenait dans sa vie d'immortel.

-Vous parlez d'instrument et de vous produire sur scène. J'en déduit donc que vous êtes musicien. Ou bien chanteur avec votre voix.

Et pour l'avoir entendu il n'y avait pas si longtemps, elle savait qu'il possédait une voix juste et mélodieuse. Mais aussi impressionnante. Sans doute a cause de sa nature. Car les vampire ont tout de même une voix bien différente des humains et qu'ils peuvent moduler par exemple pour manipuler les mortels.

-Comment vous nourrissez vous si vous restez la plupart du temps dans votre ville?

"- Dans ma villa, voulez-vous certainement dire. Eh bien, je me nourris comme un soir tel que celui-ci, en appatant par mon chant, je fais généralement suivre d'un petit thé que je fais semblant de boire. Et enfin, je me fais l'apôtre de la morsure sans ménagements. Une fois mon repas terminé ... Disons que les décharges clandestines ne sont plus assez sûres. Je préfère laisser cela tomber au fond du lac de Griffith park."

Au fur et à mesure de ses paroles, il semblait prendre un sourire teinté d'esprit carnassier. Revenant sur une attitude plus formelle, il réajusta une de ses manches et rangea son mouchoir qu'il tenait toujours dans la main dans une petite boîte à lunettes. Puis enfin il reprit:

"- Et pour répondre à votre question première, je suis certes chanteur et musicien. Deux domaines ou j'officie en même temps grâce à mes dons vampiriques. Mais l'Art ne nourrissant pas son homme, je me cantonne au commerce d'antiquités."

Pendant qu'il parlait, il usa de sa télékinésie pour saisir une de ses cartes de visite dans une de ses poches avant de la laisser flotter jusque devant la main de Tarjha. L'air légèrement amusé par sa propre plaisanterie.

"- N'hésitez pas à me rendre visite de temps à autre. Mais, excusez ma curiosité, quelle est donc votre activité en ces Nuits modernes ?"

La langue de Tarjha avait fourché et elle eut un geste d'excuse.
Il lui raconta ensuite comment ses chasses se déroulaient et le sourire de la vampire changea une seconde. Son récit était très alléchant et donnait soif. Mais très vite elle repris sa contenance. Elle prit la carte de visite et porta son regard dessus quelques secondes.

-Je passerais avec plaisir à votre magasin. Et si vous avez des armes ou des objets issus de vieilles civilisations vous ferez mon bonheur.

Et oui, elle ne cachait pas son goût pour le passé, ses civilisations guerrières et fières.

-Pour ma part, je suis tenancière d'un bar, malheureusement je ne peux vous présenter de carte de visite. N'hésitez pas à passer de temps en temps.

Elle en profita pour lui envoyer une image du lieu et de sa position par télépathie. En profitant pour s'excuser de cette intrusion sans permission.

La sonde télépathique qui s'introduit en lui surprit tout de même Charles, qui eut un léger mouvement de bloquage, le temps d'analyser qui lui envoyait le signal. Une fois ceci fait, il laissa son esprit prendre note de l'endroit et remercia Tarjha.

- Pour en revenir aux antiquités, il faudrait que je consulte mon registre. Il me semble encore avoir deux épieus de guerre Français datant de la guerre de cent ans. Mais je dois bien malheureusement avouer que mes antiquités sont plus proches de nous. J'ai par contre une petite collection de sabres Napoléoniens, dont un de capitaine de brigade.

Habilement subtilisé durant une soirée, ne s'empressa t-il pas de préciser. La grande particularité des antiquités proposées dans la boutique n'était qu'une série de pièces volées ou empruntées à durée indéfinie. Ne cherchant pas à s'étaler sur le sujet des antiquités, Charles dévia subtilement la conversation.

- Et votre affaire sert-elle le précieux nectar qui nous enivre ? J'avoue que je me pose cette question depuis que le souvenir de certaines nuits Parisiennes un tantinet délurées m'est revenu en tête.

Tarjha écouta attentivement Charles. Mais a voir sa façon de poser les intonations et de sourire, elle devina plus ou moins que son commerce avait un brin de non honnêteté. Mais après tout elle s'en fichait. Les vampires sont des êtres plutôt malhonnêtes et les morts ne profitaient plus de leurs bien alors autant en profiter.
Machinalement elle prit une mèche de ses cheveux et joua avec en la tortillant autour de son indexe. Puis elle offrit un large sourire au vampire, un sourire mystérieux et carnassier.

-Elle en sert un particulier. Il n'est point mauvais mais n'a rien a envier au nectar de nos nuits de chasses.

Elle préférait ne pas trop préciser là dessus. Après tout, elle avait déjà rencontrée un vampire scandalisé par l'idée de sang fabriqué. Elle décida de faire dévier subtilement le sujet.

-Vous connaissez donc Paris. J'y ai passé un certain temps et vécu de nombreuses nuits. Quelle est donc cette nuit que vous évoquez?

Il tiqua sur l'affirmation de service de sang, mais il aurait bien le temps de se faire une idée en lui rendant visite. En tout cas si son bar proposait du sang, cela devait être une adresse à retenir. Il ne lui resterait plus qu'a se faire une idée de visu, surtout qu'expliquer pourquoi elle disait que le sang n'était pas meilleur que les nuits de chasses semblait la déranger. Autant ne pas continuer sur un sujet si glissant, surtout lorsque le premier tête à tête était aussi fortuit que celui-ci. Il préféra donc répondre à sa question, en toute honnêteté.

"- Je parle, chère amie, des nuits Napoléoniennes et des plaisirs de ce temps. Car en effet, bien que d'un point de vue philosophique c'eut été bien dommage de réduire ainsi les efforts d'une révolution si fabuleuse. Je rejoignais plutôt le point de vue de l'organisateur de ces divines soirées : Armand. Si vous êtes passée par Paris, peut être nous sommes nous éjà rencontrés sans pour autant nous en souvenir. Entre les chairs à nues et autres soirées de préciosité et d'écarlate mêlés."

Son ton était presque chantant, parler à un vampire de son âge était en ce sens réjouissant que l'on pouvait lui faire comprendre toutes choses que l'on avait vêcu durant les débuts de son éternité. Il souriait, à la façon d'un dément et se leva alors que les verrous de son coffret claquait et d'où un violon estampillé de la marque des stradivarius qui vint se placer derrière le vampire.

"- Deux réponses à une question qui m'émoustille. Avez-vous vécû cela ? Si oui, permettez de vous le remémorer. Et si non, laissez moi vous conter ce temps de décadence !"

Il dansait presque, son violon commençant à jouer tout en volant autour de lui. Il la regardait d'un air d'envie et de nostalgie mêlées. Mais l'ensemble du personnage n'en restait pas moins tout aussi magnifique que le récit qu'il s'apprêtait à chanter en cettenuit douce.

La jeune Tarjha hocha la tête légèrement.

-Oui j'ai vécu cette époque. Pas très bien mais suffisamment pour savoir ce qui se passait dans ces soirées.

Elle constata que Charles avait une parfaite maitrise de ses dons. Le violon se mit à jouer tout seul, voletant autour des deux vampires. L'air qu'il jouait était familier à l'oreille de la barmaid et, fermant les yeux, elle se laissa aller à écouter ses souvenirs. Puis elle revint à la conversation avec un air à la fois rêveur et attentif.

-Ce sera avec plaisir que je me remémorerait ces temps avec vous.

N'écoutant que son art et faisant appel à l'ensemble de sa mélancolie d'une époque maintenant révolue. Un coup sur l'archer, la première note, le premier pas. Au son d'une valse populaire, il s'avança vers la vampire et lui présenta sa personne pour une danse. Qu'importe ses talents à ce niveau là, il menait le pas avec calme, joie et attention. Il se donna une petite dizaine de minutes pour ce moment de souvenirs et d'une ambiance fort peu naturelle. Un couple dansant tout en étant encadré par un violon flottant dans l'air et jouant des airs d'autrefois.

- J'espère que vous appréciez cette petite ballade très chère, pour ma part cela faisait bien longtemps que je rêvais d'une telle réminicsence.

Ca y est se dit Charles, car il avait aidé cette personne à se détendre et avait usé de télépathie pour bloquer son mental. Elle était fort sympathique, cette semblable. Mais son éternité avait appris à l'artiste à se méfier des rencontres inopportunes. Lentement, il avait rapproché sa canne-épée tout au long de la danse. Sur une série de notes hautes et couvrant l'acoustique ambiante lui avait permis de dégainer son arme à distance. Pour quelqu'un qui maîtrisait les notes d'un orchestre de chambre à la fois, cette ruse n'avait rien de compliqué. Sur la note finale, Tarjha put sentir la pointe acérée de l'arme poindre contre son occipital. La ceinturant fermement, Charles lui chuchota à l'oreille.

- Et maintenant, si vous tenez à votre survie, vous n'aurez qu'a me convaincre que vous n'êtes pas du Talmasca. Et pas de gestes brusques je vous prie ... Nous sommes entre gens civilisés et je vous promets de ne rien tenter tant que je ne serais sûr de rien.

Tarjha se laissa emporter par la musique à tel point qu'elle perdit toute prudence élémentaire. Prudence qu'elle avait déjà du mal à conserver lorsqu'elle rencontrait quelqu'un. Elle répondit avec courtoisie et légèreté à la danse que le vampire lui proposait. Ils firent quelques pas d'une valse dont le souvenir était à la fois doux et triste pour la vampire.
Bien que habituée aux coups en douce et à l'intrigue, elle ne vit rien venir. Elle n'entendit rien non plus et s'était tout à fait laisser emportée par l'ambiance, pensant que rien de pouvait arriver de mauvais dans une situation pareille. Malheureusement pour elle, la vampire rencontra un écueil. Elle n'eut pas le temps de réagir qu'elle sentit l'étreinte de Charles se serrer fortement autour de sa taille et qu'elle sentit la présence de l'arme contre sa tête.
En quelques secondes tout se bouleversa dans sa tête. Le retour à une réalité dangereuse et une mort proposé lui fit l'effet d'une gifle, tandis que la dernière note et la plus mélancolique résonnait encore dans l'air du soir. Elle eut tout juste le temps de crier son étonnement avant que son interlocuteur ne lui chuchote quelques mots à l'oreille. Qu'est ce que le Talamasca venait faire dans cette conversation? Et puis pour quelle raison croyait il qu'elle en faisait partie?

-Le Talamasca? Mais qu'est-ce que... D'où vous vient cette idée farfelue?

Un instant elle pensa à la lame dont la pointe était tout près de sa tête. Il ne fallait qu'une petite pression pour qu'elle transperce son crâne. Une demi seconde l'idée de la mort traversa ses pensées et la séduisait. Mais pourquoi mourir dans un moment pareil et pour une raison telle que celle-ci. Elle regarda le vampire dans les yeux, mettant une pointe de colère dans ses yeux.

-Je ne sais pas pour quelle raison vous avez un tel comportement, mais je puis vous assurer qu'il n'est en aucun cas justifié. Et d'ailleurs je me demande bien pourquoi je ferais partie du Talamasca alors que je n'ai aucune bonne raison de leur faire confiance?

En fait elle avait mis bien plus de colère qu'elle ne l'aurais voulu mais après tout s'il voulait l'agresser et se battre elle se défendrait.

Charles sourit en son fort intérieur, ce genre de petits coups en douces était sa spécialité dans un monde nocturne si dangereux. Avec calme et parcimonie, il relâcha son étreinte avant de relâcher son violon dans le coffret prêvu pour son transport. Enfin, d'une voix claire et étonnament froide il reprit, tout en faisant dériver l'arme pour qu'elle pointe sur le coeur de Tarjha.

- Allons, allons ... Ce n'est pas cela qui importe réellement, vos justifications hâtives ne sont pas convaincantes, vous devez bien être la première à vous en rendre compte, j'en suis certain. J'ai mes raisons de me méfier du Talmasca et il me le rend bien. Si vous êtes également dans ce style de situation, fournissez m'en une preuve, cela ne sera que plus concret. Je suis prêt à me laisser convaincre, faut il encore tourner la bonne clé.

Son regard était non pas furieux, mais impitoyable avec une teinte de paranoïa. cette paranoïa habilement cultivée pour devenir son meilleur atout dans l'éternité. Il ne fallait pas se moquer de lui c'était certain, mais il restait de bonne fois et ne tenterait en effet rien tant qu'il ne serait pas sûr des intentions de la vampire qu'il menaçait de tuer. Ce ne serait pas la première et encore moins la dernière.

Toutes ses émotions se mélangeaient dans sa tête. La lame de la canne épée pointée sur sa poitrine et le son du violon qui avait cessé rendait à la scène quelque chose de dramatique. Le silence, Tarjha ne l'aimait pas et même les insectes s'étaient tus. Elle avait pourtant le sentiment de ne pas vouloir disparaitre tout de suite. Mais comme Charles l'avait dit elle devait se montrer convaincante. Il était bien sur hors de question de se débattre.
Elle le regarda droit dans les yeux, affrontant son regard fou et parla.

-Je n'ai rien a voir avec le Talamasca. Il ne m'inspire pas de crainte mais ne m'intéresse pas plus. Vous semblez penser que j'en fais partis et que je vous aurais suivi mais notre rencontre n'est que le fruit d'un certain hasard. Si vous semblez penser qu'ils peuvent vous suivre, c'est certainement que vous avez agit de façon à les faire réagir. Mais vous n'avez rien a craindre de moi, je suis neutre. Et vous pouvez le constater dans mes pensées ou autrement.

Sur ces paroles qu'elle même ne trouvait pas assez convaincante, elle se mordit la lèvre afin de montrer qu'il pouvait puiser dans son sang les informations qu'il désirait. Et elle ouvrit également son mental afin de lui permettre d'y entrer.
Là où d'autres vampires hésiteraient pour protéger leur intimité, Tarjha était libérée. Pour sur elle n'avait pas froid aux yeux et ne semblait avoir peur de rien.

- A vrai dire, chère amie. Je ne pense rien.

Dit-il avec un grand sourire, c'était en quelque sorte plus que vrai, si elle tendait son esprit vers lui, elle ne remarquerait en effet qu'un vide absolu. Mais il s'agissait là d'autre chose, de tout autre chose. Dardant un regard taquin aux reflets maléfiques, il reprit, proche du visage de la vampire.

- Je préfère prévenir plutôt que guérir. Si vous êtes du Talmasca, nous sommes donc dans une impasse car je serais découvert pour ce que j'ai fait. Si vous n'en êtes pas, je vous relâcherais sans aucune hésitation et vous prierait de m'excuser le plus profondément du monde.

D'un baiser rapide, il receuillit le sang avec un sourire espiègle, s'amusant à faire tourner la canne épée dans un sens ou l'autre avec le mouvement d'une perceuse. Il ne s'était que bien trop rendu compte de par le passé que l'intimidation était la première des tortures. Goûtant le sang, il s'apprêtait à en faire connaître une nouvelle à Tarjha.

- Quelle ... confiance pouvez-vous bien avoir en votre agresseur ? Nous le savons tous les deux. La conscience de la survie.

Et il fit entrer son esprit dans celui de Tarjha, tel un poignard acéré. Si il découvrait quelque chose qui confirmait ses soupçons, autant assomer mentalement son ennemie pour être sûr d'avoir le temps libre. Bientôt, il retourna en son esprit, ayant trouvé les informations l'intéressant. En parfait gentleman, il n'avait pas fouillé l'ensemble de la vie de la vampire.

- Elysium. Du sang factice ?!

Ses yeux exprimaient de l'incompréhension, de l'horreur et une certaine curiosité malsaine. Etonné, il recula et fit voleter son épée jusque dans son fourreau. Il attendait qu'on lui rende des comptes, c'était manifeste.

Sujet: Re: Une petite envie de verdure ... Lun 22 Sep 2008 - 13:17

[HRP=désolé du retard j'ai du déménager au dernier moment]

En sentant l'étreinte de son agresseur se faire moins brutale, Tarjha en profita pour passer la main dans ses cheveux. Elle n'avait aucune crainte. Elle avait même une expression trop calme sur le visage. Peut être que l'envie de mourir qui avait traversé son esprit l'attirait vraiment.
En revanche Charles avait une toute autre expression. Il semblait intrigué de savoir certains points de l'E.C. Elle s'assit avec un calme olympien. Elle l'invita également, il semblait vouloir en savoir plus.

-L'Esylium est une entreprise pharmaceutique qui a été créée pour aider les surnaturels qui le souhaitent à se cacher de la population. Le sang factice qui fait parti d'un de leur produit à été créé pour les vampires qui refusent de tuer pour se nourrir. Et c'est aussi ce sang que j'emploie dans mon bar afin de ne pas trop saigner la population humaine.

Elle lui avait expliqué sommairement, mais c'était suffisent. Le résumé était vraiment condensé, en revanche le comportement de cet homme lui laissait penser qu'il serait difficile de lui faire confiance.

Sujet: Re: Une petite envie de verdure ... Lun 22 Sep 2008 - 16:49

[HRP : Après mure réflexion, je t'excuse ^^]

Elle s'était rassise sur le banc, l'air manifestement d'avoir ravalé ses angoisses au plus profond d'elle-même. Un demi-sourire au lèvres, Charles se rassit également dans un mouvement gracieux et altier dont il avait le secret. Calmement, il sortit de nouveau un mouchoir encore propre et le passa sur ses lèvres pour les débarbouiller du sang. Il écoutait poliment, ne fixant pas le regard de cette femme aux occupations décidément peu communes. L'air intéressé, il haussa un sourcil empreint de curiosité en réponse au discours de Tarjha.

- Ainsi donc, vous proposez dans votre établissement un standing d'éprouvettes. C'est ma foi fort déconcertant ... Dire que lors de ma jeunesse humaine, la chimie n'en était qu'a ces balbutiements, l'humain est une créature fantastique. Cependant et même si le Talmasca ne doit en effet pas vous être réellement acquis, j'émets une réserve à votre beau geste : En effet, les vampires qui refusent de se nourrir de sang sont tués ou meurent de faim ... N'avez point trop peur d'une surpopulation ? Quand aux modalités purement pratiques ... Je vous achèterais bien une bouteille, pour juger de la qualité de ce sang ... curiosité oblige.

Un sourire charmeur combiné à un regard encore empreint de l'excitation d'avoir été à deux doigts de tuer un des siens. Ce gentilhomme aux bonnes manières gardait enfoui au fond de lui une rage et une envie de débauche bien importantes et l'idée de ne plus chasser le minait intérieurement. Mais, malgré tout, la nécessite de se faire des alliés au sein des opposants au talmasca risquait d'être obligatoire. C'était donc plus par renoncement que par intérêt que Charles s'intéressait à cette histoire de sang factice jugeant en fin de compte la privation de la chasse comme un manque bien trop important dans sa propre vie.

Sujet: Re: Une petite envie de verdure ... Mar 30 Sep 2008 - 19:20

Il semblait avoir compris mais de façon incomplète. Elle repris ses paroles et corrigea ce qui semblait être mal compris.

-Les vampires qui aiment chasser n'ont pas recours à ce sang comme ceux qui se refusent à faire du mal aux humains. Dans mon bar ce sang est plus pour le plaisir du palais que pour se nourrir. Moi même je chasse tous les soirs et ne boit ce sang que dans un cocktail pour accompagner un ami. Si vous souhaitez goûté à ce nectar au goût si particulier je vous invite à me rendre visite un soir.

Elle semblait si détaché, comme si quelques instants plus tôt rien ne s'était passé. Pourtant elle repensait à l'évènement et y repenserait encore en se disant qu'en fonction de ses mots et gestes l'issus aurait pu être tout à fait différente.