- Monsieur Tuesli ?
Vayne était plongé dans sa lecture de
La Reine des Damnés, qu'il lisait pour la septième fois consécutive, toujours aussi intéressé par l'histoire des vampires décrite par Maharet. Il était surprenant d'apprendre qu'une explication
presque rationnelle permettait de justifier l'existence des vampires en ce monde, et cette explication pouvait même lui être appliquée, à lui l'anomalie de la nature. Du coup, il ne se lassait pas de relire le roman, ravi que l'égocentrisme de Lestat ait donné naissance à ces livres absolument passionnants.
- Vayne Tuesli, vous m'entendez ?!
Vayne sursauta quand la voix insistante finit par franchir la barrière de ses perceptions uniquement tournées vers sa lecture, et tourna son regard carmin vers son interlocuteur, un des agents de terrain du Talamasca. Il plaça un marque page entre les pages de son exemplaire et le déposa sous son bureau.
- C'est à quel sujet ?
- Violette Merridew vous demande dans son bureau, immédiatement.
- Ca date de quand, ce "immédiatement" ? fit Vayne, pris d'un doute soudain.
- Une demie heure, maugréa son interlocuteur. Un record.
- Toutes mes excuses, répondit Vayne, j'y vais de suite.
Saisissant sa veste, il quitta la salle des archives et grimpa quatre à quatre les escaliers de la grande maison jusqu'à atteindre le bureau de la dirigeante de la Maison de L.A. La jeune femme se retourna à son entrée et, soupirant légèrement, lui désigna un fauteuil.
- Asseyez vous, monsieur Tuesli, nous avons à parler.
- Je m'en doute...
Vayne ne connaissait pas vraiment la jeune femme, peu enclin à quitter la salle des archives. Il préférait s'occuper des siècles de connaissances de l'organisation que de ses employés, et n'avait donc que peu de contacts avec ses supérieurs, hormis lors des - relativement rares - missions extérieures qu'on lui confiait.
Il se doutait cependant qu'on allait faire appel à lui désormais. Le vol commis au sein même du Talamasca avait eu lieu dans les archives, le fief de Tuesli. Il était dans ses quartiers personnels à ce moment là, et n'avait donc rien à se reprocher, mais il avait été le premier à se rendre compte de la disparition d'un des hommes sous sa tutelle. Quelque chose n'allait vraiment pas.
- Comme vous le savez, des documents de la plus haute importance...
- Nous ont été volés, je sais, l'interrompit Vayne, ne se souciant guère de la moue désapprobatrice de la jeune femme. Allez droit au but s'il vous plait...
Elle soupira, hochant la tête, et croisa les doigts sous son menton, l'air sombre.
- Nous avons déjà envoyé un certain nombre d'agents sur le terrain, mais beaucoup sont déjà en mission pour d'autres affaires, et vous êtes le mieux au fait du contenu des documents volés. En regard à vos capacités naturelles, j'ai préférer requérir à vos services plutôt que d'ôter à un autre agent sa mission en cours.
- Je vois...
- Actuellement, nous n'avons absolument aucune idée du pourquoi ou du comment de ce vol, mais une chose est sûre, le contenu de ses documents est suffisant pour nous préparer à faire face à une crise d'ampleur. Par conséquent, monsieur Tuesli, je vous demanderai de bien vouloir mettre de côtés vos fonctions d'archiviste pour rentabiliser vos... capacités... sur le terrain, de la meilleur façon possible. Suis-je claire ?
- Autant qu'il est possible en de telles circonstances, je suppose. Une direction particulière... ?
- Vagabondez dans la ville, laissez trainer vos oreilles. Vous étiez dans la mafia, si j'ai bien compris... ?
Vayne laissa échapper un rire sarcastique.
- On peut dire ça, oui. Un mauvais concours de circonstances, qui s'est fini comme vous pouvez le voir actuellement.
- Toutes les sources d'informations sont à prendre, insista la directrice. Vous pourriez apprendre de quoi nous permettre de découvrir certaines choses.
Vayne hocha la tête mais ne rajouta rien. Après quelques secondes de silence, la jeune femme ajouta :
- Ce sera tout, je pense. Bonne chance.
Vayne remercia la dirigeante et quitta le bureau. Les Novices qu'il croisa dans la grande Maison le considérèrent avec curiosité. Statistiquement, il était le seul vampire - même raté - à être membre du Talamasca, et il n'était pas rare que certains viennent à Los Angelès dans le seul but de voir un tel spécimen. Comme toujours, il les ignora royalement. Il signala son départ aux responsables des déplacements et quitta le Centre, sans la moindre idée de l'endroit où il allait se rendre pour commencer.
Deux heures et demie plus tard, ses pas - oui, il était à pied, bien qu'il disposât d'une voiture, parce que marcher en étant plongé dans ses pensées était moins dangereux que conduire en pensant - l'amenaient vers
Griffith Park...